Trasmettere
agli organi di stampa fotografie di una persona accusata in un procedimento
penale costituisce una violazione dell’articolo 8 della Convenzione europea
dei diritti dell’uomo.
Lo ha stabilito la Corte europea dei diritti dell’uomo, con la sentenza
dell’11 gennaio 2005 (50774/99), originata dal ricorso di un’insegnante
italiana - fermata e posta agli arresti domiciliari con l’accusa di associazione
a delinquere, evasione fiscale e falso - la cui fotografia, scattata durante
le indagini, era stata diffusa nel corso di una conferenza stampa delle
forze dell’ordine e quindi pubblicata su diverse edizioni di due quotidiani
locali.
Il caso è stato recententemente segnalato dal Garante della Privacy,
che ha sottolineato alcune peculiarità della fattispecie: essa,
in primo luogo, non riguardava un personaggio pubblico; inoltre, la foto
pubblicata proveniente dal fascicolo d’inchiesta era stata fornita ai
giornali da agenti della Guardia di finanza.
Per accertare la lamentata ingerenza nella sfera privata, la Corte ha
valutato - conformemente alla sua giurisprudenza - il rispetto
dei requisiti previsti dall’Art. 8(2) della Convenzione europea dei diritti
dell’uomo. Tale comma stabilisce, infatti, che si possa interferire con
la vita privata di una persona soltanto se ciò è "previsto
dalla legge", e "necessario, in una società democratica"
per raggiungere gli scopi indicati nello stesso comma (pubblica sicurezza,
protezione dell’ordine, della salute o della morale pubblica, o protezione
dei diritti e della libertà altrui.).
In particolare, quanto al primo punto, i giudici hanno ravvisato l’inapplicabilità
al caso in oggetto dell’eccezione al segreto degli atti di indagini prevista
dall’articolo 329(2) del codice di procedura penale italiano. Tale eccezione
riguarda unicamente la circostanza in cui la pubblicità di uno
degli atti sia necessaria ai fini della prosecuzione dell’indagine, il
che non è sostenibile nel caso di specie. Pertanto, la Corte non
ha riscontrato la presenza di previsioni normative che giustificassero
l’ingerenza nella vita privata della ricorrente, e non ha ritenuto di
doversi pronunciare sull’altro requisito imponendo allo Stato italiano
di risarcire l’insegnante delle spese processuali.
(Altalex, 5 febbraio 2005)
CONSEIL DE L’EUROPE COUNCIL OF EUROPE COUR EUROPÉENNE DES
DROITS DE L’HOMME EUROPEAN COURT OF HUMAN RIGHTS
QUATRIÈME SECTION
AFFAIRE SCIACCA c. ITALIE
(Requête no 50774/99)
ARRÊT
STRASBOURG
11 janvier 2005
Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies
à l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches
de forme.
ARRÊT SCIACCA c. ITALIE 1
En l’affaire Sciacca c. Italie,
La Cour européenne des Droits de l’Homme (quatrième section),
siégeant en une chambre composée de :
Sir Nicolas BRATZA , président, MM. G. BONELLO , K. TRAJA , V.
ZAGREBELSKY , L. GARLICKI , J. BORREGO BORREGO , Mme L. MIJOVIC, juges,
et de M. M. O’BOYLE, greffier de section,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil
le 7 décembre 2004,
Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :
PROCÉDURE
1. A l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 50774/99)
dirigée contre la République italienne et dont une ressortissante
de cet Etat, Mme Carmela Sciacca (« la requérante »),
a saisi la Cour le 1er juin 1999 en vertu de l’article 34 de la Convention
de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales
(« la Convention »).
2. La requérante est représentée par Me E.P. Reale,
avocat à Syracuse. Le gouvernement italien (« le Gouvernement
») est représenté par son agent, I.M. Braguglia, et
par son coagent, F. Crisafulli.
3. La requérante alléguait en particulier que la publication
da sa photo avait enfreint l’article 8 de la Convention.
4. La requête a été attribuée à la première
section de la Cour (article 52 § 1 du règlement). Au sein
de celle-ci, la chambre chargée d’examiner l’affaire (article 27
§ 1 de la Convention) a été constituée conformément
à l’article 26 § 1 du règlement.
5. Par une décision du 4 septembre 2003, la chambre a déclaré
la requête partiellement recevable.
EN FAIT I. LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE
6. La requérante est née en 1949 et réside à
Syracuse.
7. Professeur, elle enseignait dans une école privée à
Lentini (Syracuse). L’école était propriété
de la société à responsabilité limitée
G., dont la requérante ainsi que trois autres professeurs étaient
les associés alors que M. G. en était le gérant.
2 ARRÊT SCIACCA c. ITALIE
8. En juillet 1998, Mme C. porta plainte auprès de la garde du
fisc (Guardia di Finanza) pour des irrégularités de gestion
de l’activité de l’école. Elle indiqua être une associée
de fait de la société G.
9. Le parquet de Syracuse ouvrit une enquête contre les associés
et le gérant. Le 20 juillet 1998, la garde du fisc fit une perquisition
au siège de la société et au domicile des associés.
A cette occasion, la requérante reçut une communication
officielle l’informant qu’une enquête avait été ouverte
à son encontre.
A une date non précisée, le parquet ordonna l’audition de
la requérante et l’informa qu’elle était soupçonnée,
avec les autres inculpés, d’extorsion, d’escroquerie et de faux.
Le 12 août 1998, la garde du fisc interrogea la requérante.
10. Le 17 novembre 1998, le parquet demanda au juge des investigations
préliminaires de décerner un mandat d’arrêt contre
la requérante et certaines inculpées pour association de
malfaiteurs, évasion fiscale et faux en écriture publique.
Le 28 novembre 1998, le juge des investigations préliminaires ordonna
l’assignation à domicile de la requérante et des autres
co-inculpées.
11. Le 4 décembre 1998, la requérante reçut notification
de la décision du juge. Comme toute personne assignée à
domicile, elle ne fut pas écrouée. Cependant, en cette circonstance,
la garde du fisc constitua un dossier personnel au nom de la requérante
; des photographies et ses empreintes digitales y furent versées.
Le même jour, le substitut du parquet chargé de l’enquête
et des agents de la garde du fisc donnèrent une conférence
de presse.
12. Deux journaux publièrent des articles sur l’enquête.
13. Le quotidien Giornale di Sicilia publia deux articles les 5 et 6 décembre
1998. Dans le premier, il parla de « prétendues illégalités
formelles et substantielles dans la gestion d’une école privée
». Après avoir indiqué que la requérante et
trois autres personnes, assignées à domicile, étaient
inculpées de faits très graves (association de malfaiteurs,
extorsion, faux, escroquerie et évasion fiscale), le journal indiqua
que d’autres inculpés « auraient également été
» victimes d’extorsions de la part des quatre personnes arrêtées.
Après avoir donné un aperçu de l’activité
des enquêteurs, le journal indiquait que les quatre personnes assignées
à domicile « auraient été » les gérantes
de fait de l’école. Par la suite, le quotidien expliquait en quoi
consistait l’extorsion. Il ajoutait qu’une « comptabilité
parallèle aurait été trouvée au domicile des
quatre personnes » et que les « enquêteurs auraient
constaté que les élèves inscrits » dans deux
classes « étaient en réalité les époux
et des cousins des femmes arrêtées ». Le seul passage
relatant les déclarations des enquêteurs visait une personne
autre que la requérante.
14. L’autre article – publié le jour suivant, avec la photographie
des quatre femmes arrêtées – avait un contenu similaire
au premier.
ARRÊT SCIACCA c. ITALIE 3
15. Un second quotidien, la Sicilia, publia le 5 décembre 1998,
en première page, la photographie – en format d’identité
– des quatre personnes assignées à domicile et indiqua
que celles-ci « avaient mis en place une « école fantôme
». Le contenu de l’article était comparable à celui
des articles du premier quotidien.
16. La photographie de la requérante fut publiée, avec celle
des trois autres femmes arrêtées, à quatre reprises
les 5 et 6 décembre 1998. Il s’agissait à chaque fois d’une
photographie d’identité prise lors de la constitution du dossier
au moment de l’arrestation de la requérante par la police du fisc
et remise par cette dernière à la presse.
17. Le 12 décembre 1998, la requérante attaqua devant le
Tribunal de la liberté de Catane l’assignation à domicile.
Le 28 décembre 1998, ladite juridiction ordonna sa mise en liberté,
car, pour les besoins de l’enquête, l’assignation à domicile
n’était plus nécessaire.
18. Le 1er mars 1999, le parquet demanda que la requérante fût
renvoyée en jugement. L’audience devant le juge des investigations
préliminaires fut fixée au 26 mai 1999. Toutefois, la requérante
renonça à cette étape de la procédure et demanda
à être jugée par le tribunal selon la procédure
abrégée.
L’audience devant le tribunal de Syracuse fut donc fixée au 6 juin
2000.
19. Le 8 mars 2002, la procédure s’acheva par la procédure
spéciale de l’application d’une peine, convenue entre la requérante
et l’accusation (article 444 du code de procédure pénale,
« applicazione della pena su richiesta delle parti »), d’un
an et dix mois de réclusion et de 300 euros d’amende.II. LE DROIT
INTERNE PERTINENT
20. Les parties n’ont fourni à la Cour aucune indication quant
à d’éventuelles dispositions de loi régissant la
prise de photographies de personnes prévenues ou arrêtées
et assignées à domicile sans être écrouées
et leur communication à la presse.
Le décret du président de la République no 431 du
29 avril 1976 fixe le règlement d’exécution de la loi no
354 du 26 juillet 1975 sur l’organisation pénitentiaire.
En ce qui concerne les prévenus arrêtés et écroués,
les paragraphes 1 et 2 de l’article 26 du règlement d’exécution
sont ainsi libellés : « Un dossier personnel est constitué
pour chaque détenu ou interné dès qu’il est écroué.
Le dossier suit l’intéressé lors de chaque transfert et
est gardé dans les archives du pénitencier par lequel le
détenu ou interné est remis en liberté. Le ministère
est informé de cette conservation.
Les références de ce dossier personnel comprennent les données
d’état civil, les empreintes digitales, la photographie et tout
autre élément nécessaire pour l’identification exacte
de la personne. »
De la lecture du paragraphe 5 du même article, il ressort que la
constitution d’un dossier personnel concerne également les personnes
en détention provisoire.
4 ARRÊT SCIACCA c. ITALIE
21. La loi no 121 du 1er avril 1981 concerne la nouvelle organisation
de la sécurité publique. Les dispositions pertinentes se
lisent ainsi : Article 6
Coordination et direction des forces de police
Le département de la Sécurité, afin de mettre en
oeuvre les directives données par le ministre de l’Intérieur
dans l’exercice des fonctions de coordination et de direction unitaire
en matière d’ordre et de sécurité publique, exerce
les tâches de
a) classement, analyse et évaluation des informations et des données
devant être fournies également par les forces de police en
matière de protection de l’Ordre et de la Sécurité
publique, de prévention et de répression de la criminalité
et de diffusion aux services opérationnels des forces de police
précitées ;
(...)
Article 7
Nature et quantité des données et informations collectées
Les informations et données mentionnées dans l’article 6,
alinéa a), doivent se rapporter à des renseignements tirés
soit de documents qui, en tout cas, sont gardés par l’administration
publique ou par des services publics, soit de jugements ou de décisions
de l’autorité judiciaire, soit de documents concernant l’instruction
pénale qui sont disponibles aux termes de l’article 165-ter du
code de procédure pénale ou d’enquêtes de police.
Dans tous les cas, il est interdit de collecter des informations et des
données sur les citoyens du seul fait de leur race, religion ou
opinion politique ou de leur adhésion aux principes de mouvements
syndicaux, coopératifs, caritatifs, culturels ainsi que pour l’activité
légitime exercée en tant que membre d’une organisation légalement
active dans les domaines précités.
(...)
EN DROIT I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 8 DE
LA CONVENTION
22. La requérante se plaint de ce que la diffusion, à l’occasion
de la conférence de presse organisée par le parquet et la
garde du fisc, de sa photographie aurait enfreint son droit au respect
de sa vie privée. La requérante invoque l’article 8 de la
Convention ainsi libellé : « 1. Toute personne a droit au
respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa
correspondance.
ARRÊT SCIACCA c. ITALIE 5 2. Il ne peut y avoir ingérence
d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant
que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue
une mesure qui, dans une société démocratique, est
nécessaire à la sécurité nationale, à
la sûreté publique, au bien-être économique
du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention
des infractions pénales, à la protection de la santé
ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés
d’autrui. »
23. Le grief originel de la requérante portait également
sur la diffusion, pendant ladite conférence de presse, d’informations
la concernant (partie du grief que la Cour a déclaré irrecevable
le 4 septembre 2003 - cf. paragraphe 5 ci-dessus). Le Gouvernement avait
présenté des observations sans faire distinction entre les
informations fournies et la communication de la photographie. Ces observations
peuvent se résumer ainsi même si elles ne portent pas spécifiquement
sur la question de la communication de la photographie.
Le Gouvernement rappelle que le droit de la requérante au respect
de sa vie privée trouve une limitation dans le droit du public
à être informé ainsi que dans le but de la prévention
d’autres infractions pénales. Il rappelle que l’article 10 de la
Convention garantit les libertés d’opinion et de presse. Celles-ci
ne rencontrent une limite que lorsque l’inculpé subit un «
procès dans la presse » (arrêt Sunday Times c. Royaume-Uni
du 26 avril 1979, série A no 30, § 63). Quant au second aspect,
le Gouvernement affirme qu’en l’espèce, il y a lieu de tenir compte
de la nature des infractions pour lesquelles la requérante avait
été accusée – et par la suite condamnée
–, liées notamment à la gestion d’une école
et lésant les intérêts de la collectivité.
Partant, les faits à l’origine des poursuites, qui ne concernaient
pas strictement la vie privée de la requérante, constituaient
des éléments que la communauté avait intérêt
à connaître.
En conclusion, d’après le Gouvernement, il n’y aurait pas violation
de la disposition invoquée.
24. La requérante s’oppose à la thèse du Gouvernement.
Elle soutient que cette ingérence n’était ni prévue
par la loi ni nécessaire pour l’un des buts indiqués dans
le paragraphe 2 de l’article 8. En effet, les faits étaient ignorés
par l’opinion publique, qui de ce fait n’avait aucun intérêt
à en être informée ni à connaître le
développement des investigations. En tout cas, le fait de donner
à la presse sa photographie, extraite du dossier, ne se justifierait
d’aucune façon. La prétendue absence d’un prononcé
formel de culpabilité de la part de l’autorité judiciaire
serait réfutée par le contenu des articles écrits
à l’issue de la conférence de presse.
25. Quant aux faits divulgués à l’occasion de la conférence
de presse, la requérante conteste l’existence d’un intérêt
du public à en être informé et revendique leur caractère
privé. Malgré la gravité des délits, les informations
relatives à la procédure pénale, et surtout la photographie
prise par les enquêteurs au moment de l’arrestation, auraient dû
rester secrètes. La requérante attire en outre l’attention
de la Cour sur le fait que le Gouvernement n’a pas donné d’explications
quant à la remise de la photographie aux organes de presse.
26. La Cour note que le Gouvernement n’a pas contesté que la photographie
publiée avait été prise lors de la constitution du
dossier au
6 ARRÊT SCIACCA c. ITALIE
moment de l’arrestation de la requérante et donnée par la
garde du fisc à la presse.
27. En ce domaine, la Cour a déjà eu à s’occuper
de la publication de photographies concernant des personnages publics
(Von Hannover c. Allemagne, no 59320/00, § 50, 24 juin 2004) ou des
personnalités politiques ((Schüssel c. Autriche (déc.),
no 42409/98, 21 février 2002). Après avoir conclu que la
publication de photos relevait de la vie privée, elle a eu à
se pencher sur la question du respect par l’Etat défendeur des
obligations positives qui lui incombent en ce domaine lorsque la publication
ne tire pas son origine d’une activité ou collaboration des organes
de l’Etat.
28. La présente affaire se différencie de celles déjà
traitées en ce que la requérante n’est pas une personne
qui agissait dans un contexte public (personnage public ou personnalité
politique) mais une personne qui faisait l’objet de poursuites pénales.
En outre, la photo publiée, prise pour les obligations d’un dossier
officiel, avait été fournie à la presse par la garde
du fisc (paragraphes 17 et 26 ci-dessus).
De ce fait, conformément à sa jurisprudence, la Cour se
doit de contrôler si l’Etat défendeur a respecté son
obligation de non-ingérence dans le droit au respect de la vie
privée de la requérante. Elle se doit de vérifier
s’il y a eu en l’espèce une ingérence dans ledit droit et,
dans l’affirmative, si elle a satisfait aux trois conditions posées
par le paragraphe 2 de l’article 8 : être « prévue
par la loi », viser un ou des buts légitimes au regard du
paragraphe 2 de ladite clause et être « nécessaire,
dans une société démocratique », pour les atteindre.
29. Sur l’existence d’une ingérence, la Cour note que la notion
de vie privée comprend des éléments se rapportant
à son droit à l’image et que la publication d’une photo
relève de la vie privée (Von Hannover, précité
§§ 50-53). Elle a également donné des indications
quant à l’étendue de la sphère de la vie privée
et constaté qu’il existe « une zone d’interaction entre l’individu
et des tiers qui, même dans un contexte public, peut relever de
la « vie privée » » (ibidem). Le caractère
de « personne ordinaire » de la présente requérante
restreint en l’espèce cette zone d’interaction qui, par ailleurs,
ne saurait être élargie en l’espèce du fait que la
requérante faisait l’objet de poursuites pénales.
Par conséquent, la Cour arrive à la conclusion qu’il y a
eu ingérence.
30. En ce qui concerne le respect de la condition « prévue
par la loi », la Cour constate que la requérante a contesté
le respect de cette condition sans être démentie par le gouvernement
défendeur.
Sur la base des informations dont elle dispose, la Cour est de l’avis
que la matière n’était pas régie par une «
loi » répondant aux critères fixés par la jurisprudence
de la Cour, mais plutôt par une pratique. En outre, la Cour note
que l’exception au secret des actes des investigations préliminaires
prévue à l’article 329 paragraphe 2 du code de procédure
pénale concerne la seule hypothèse de la publication d’un
acte de l’enquête pour les besoins de la continuation de celle-ci.
Ce qui n’était pas le cas en l’espèce.
La Cour arrive donc à la conclusion qu’il n’a pas été
démontré devant elle que l’ingérence était
prévue par la loi.
ARRÊT SCIACCA c. ITALIE 7
Ce constat suffit pour que la Cour conclue à la violation de l’article
8. Par conséquent, il n’y a pas lieu d’examiner si l’ingérence
en question poursuivait un « but légitime » ou était
« nécessaire, dans une société démocratique
», pour l’attendre (M.M. c. Pays-Bas, no 39339/97, § 46, arrêt
du 8 avril 2003).
31. En conclusion, il y a eu violation de l’article 8 de la Convention.
II. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION
32. Aux termes de l’ article 41 de la Convention, « Si la Cour déclare
qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le
droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement
les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la
partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable.
» A. Dommage
33. La requérante réclame 25 000 euros (EUR) à titre
de préjudice matériel. Elle justifie sa demande par le fait
que la publication de sa photo l’aurait empêchée de trouver
un travail et que ce dédommagement devrait compenser la perte de
chance d’en trouver un. Ensuite, la requérante demande 15 000 euros
à titre de préjudice moral.
34. Le Gouvernement ne présente pas de commentaires.
35. Au sujet du préjudice matériel, la Cour constate que
la requérante n’a pas prouvé son existence, pas plus, a
fortiori, qu’un quelconque lien de causalité avec la violation
constatée. Par conséquent, cette demande doit être
rejetée.
Quant au préjudice moral, la Cour estime que, dans les circonstances
de l’espèce, le constat de violation constitue en soi une satisfaction
équitable suffisante.
B. Frais
et dépens
36. La requérante demande 14 932,80 EUR pour frais et dépens.
Cette somme comprend la taxe sur la valeur ajoutée ainsi que la
contribution à la caisse de prévoyance des avocats (CPA).
37. Le Gouvernement ne présente pas de commentaires.
38. La Cour rappelle que l’allocation des frais et dépens au titre
de l’article 41 présuppose que se trouvent établis leur
réalité, leur nécessité, de même que
le caractère raisonnable de leur taux (Iatridis c. Grèce
(satisfaction équitable) [GC], no 31107/96, § 54 CEDH 2000-XI).
En outre, les frais de justice ne sont recouvrables que dans la mesure
où ils se rapportent à la violation constatée (Van
de Hurk c. Pays-Bas, arrêt du 19 avril 1994, série A no 288,
§ 66).
La Cour relève que la violation constatée ne constitue qu’un
grief parmi d’autres qui ont été déclarés
irrecevables.
8 ARRÊT SCIACCA c. ITALIE
39. Selon la jurisprudence de la Cour, un requérant ne peut obtenir
le remboursement de ses frais et dépens que dans la mesure où
se trouvent établis leur réalité, leur nécessité
et le caractère raisonnable de leur taux. En l’espèce et
compte tenu des éléments en sa possession et des critères
susmentionnés, la Cour estime raisonnable la somme de 3 500 EUR
pour la procédure devant la Cour et l’accorde au requérant.
C. Intérêts
moratoires
40. La Cour juge approprié de baser le taux des intérêts
moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de
prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré
de trois points de pourcentage.
PAR CES MOTIFS, LA COUR, À l’UNANIMITÉ, 1. Dit qu’il y a
eu violation de l’article 8 de la Convention ;
2. Dit
a) que l’Etat défendeur doit verser à la requérante,
dans les trois mois à compter du jour où l’arrêt sera
devenu définitif conformément à l’article 44 §
2 de la Convention, 3 500 EUR (trois mille cinq cents euros), plus tout
montant pouvant être dû à titre d’impôt ;
b) qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au
versement, ce montant sera à majorer d’un intérêt
simple à un taux égal à celui de la facilité
de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable
pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage
;
3. Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.
Fait en français, puis communiqué par écrit le 11
janvier 2005 en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.
Michael O’Boyle Nicolas Bratza Greffier Président.
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